Les Passagères
Elles ont quitté leur pays pour fuir la misère, la violence, l’isolement ou pour tenter de rejoindre un conjoint déjà parti. Le voyage, souvent long et par étapes, les a laissées seules, sans langue commune, devenant des cibles faciles pour les réseaux de prostitution ou de passeurs. À leur arrivée en Europe, beaucoup découvrent une nouvelle précarité : des couples brisés, des violences conjugales, et parfois la rue comme seul refuge. Certaines ont été mises à l’abri in extremis par l’association Notre-Dame des Sans-Abri, dans un ancien hôtel ou des tiny houses proches d’une bretelle d’autoroute. Là, elles tentent de se reposer et de se reconstruire, dans de petites chambres qu’elles partagent avec leurs enfants. Au fil des rencontres, j’ai entendu des récits de douleurs : une mère calmant son enfant autiste, une autre décrivant son « chemin de croix », une jeune femme évoquant un accouchement seule dans un squat, d’autres encore taisant les violences par peur de représailles. Je leur ai proposé de les photographier dans ce refuge, sur le lit où elles dorment avec leurs enfants. Un espace minuscule mais enfin sûr. Ce travail témoigne de ce moment fragile où l’on reprend souffle, où l’on se reconstruit. Ces femmes sont des passagères : entre un passé douloureux et l’espoir d’un avenir plus digne. Merci à Myriam, Laurence, Anne-Lise et Perrine pour leur confiance et leur soutien.
Faïdati, 30 ans, est originaire des Comores. Arrivée en France en 2018 avec sa fille Nadja, elle espérait une vie meilleure. Après un divorce, elle a travaillé comme assistante de vie en étant exploitée car elle n’avait pas de papiers. Aujourd'hui, elle s’efforce de reconstruire leur avenir et poursuit un diplôme pour travailler dans un Ehpad, rêvant d’horaires stables pour s'occuper de sa fille.
Moussoutou, 32 ans, et sa fille Grace, 5 ans, vivent dans au Foyer depuis mars 2020. Moussoutou garde ses fenêtres occultées par des cartons, plongée dans la pénombre. Son passé reste un mystère, un silence qu'elle n'est pas prête à briser.
À 29 ans, Andréa-Valérie trouve un nouveau départ au foyer avec sa petite Livia-Estelle, âgée de deux ans et demi. Originaire de Côte d'Ivoire, elle est venue en France dans l'espoir d'une vie familiale stable, mais face à la violence et au divorce, elle a dû reconstruire son existence. Aujourd'hui, elle travaille avec dévotion comme assistante de vie, tandis que sa fille découvre le monde à la crèche. Dans le calme de leur chambre, partagée avec amour, Andréa-Valérie retrouve la joie de vivre, un sourire timide illuminant son visage.
Georgette, 32 ans, a traversé des frontières et des guerres avec ses deux filles et sa grand-mère pour échapper au chaos du Kosovo. Depuis leur arrivée en 2002, le foyer est devenu leur sanctuaire, leur offrant sécurité et une chance de construire un futur. Les débuts furent éprouvants, mais aujourd'hui, elles chérissent chaque jour de paix. Georgette, fière de voir ses filles à l'école, envisage avec espoir une formation en français pour tisser des liens plus forts avec leur nouvelle communauté.
Eliane, venue du Congo, vit avec sa fille Derlie, 6 ans, dans le centre de Dardilly depuis 6 ans. Ne pouvant travailler faute de papiers, elle aspire à l’autonomie. Représentante des résidents, elle apporte de la vie sociale au centre, tout en rêvant d'une carrière en France.
Depuis son arrivée en France, après 15 ans en Italie, Oumoi, 49 ans, vit avec ses deux filles Aissatou et Mariama dans une chambre. Elle les protège farouchement des « dangers de la rue » en les empêchant de sortir. Oumoi apprécie les soins, la sécurité et l'attention que le foyer apporte à sa famille, tout en gardant ses souvenirs pour elle. Oumoi est une mère courageuse qui préserve ses filles tout en cherchant à reconstruire une vie stable.
M'Ah réside depuis 18 mois dans une petite maison avec ses deux filles, Mariam, 2 ans, et Aminata, 1 an. Originaire de Guinée-Conakry, elle travaille comme technicienne de surface dans une entreprise de nettoyage. Ses petites, insouciantes et joyeuses, vont à la crèche, pendant qu’elle construit un avenir pour elles.
Ludoviane, 35 ans, protège ses enfants Eliott et Lindsey des ombres d'un passé tumultueux en République démocratique du Congo. Résidant au foyer depuis dix mois, son portrait révèle une méfiance qui s'efface lentement derrière l'espoir d'un futur plus serein et sécurisé pour sa famille.
Paméla, 21 ans, et son fils Ismaël sont arrivés au foyer en décembre 2021. Elle traverse actuellement une période de changement, déménageant de chambre après quelques tensions avec ses voisines. D’abord hésitante à se laisser photographier, elle confie en souriant qu'elle envisage une formation pour travailler dans une morgue, « pour être au calme », dit-t-elle malicieusement.
Zoubeyda, originaire d’Algérie, vit au centre depuis 2014 avec ses deux fils Iyad et Aymen. Après un accident qui l’a privée de l’usage de ses jambes, elle accepte pour la première fois d’être photographiée, hors de son fauteuil. Ses fils, très attentionnés, sont sa fierté, en particulier Iyad, élu au conseil municipal des enfants.
Lucie et son fils Jean-Abiel partagent un lien indéfectible, renforcé par les épreuves et un passé douloureux. Venue du Cameroun après un divorce violent, elle trouve au centre une oasis de paix pour elle et son fils, qui vit avec des troubles autistiques sévères. La vie de Lucie est une ode à la résilience maternelle, à l'amour inconditionnel qui guide leur reconstruction quotidienne.
Khady fête ses 52 ans entourée de ses enfants, un trio dynamique et uni. Venant du Sénégal avec une étape en Espagne, cette famille porte les cicatrices d'un passé difficile mais garde les yeux fixés sur un avenir meilleur. Son portrait, capturant la fierté d'une mère dont la fille excelle dans ses études, est un vibrant hommage à la persévérance et au pouvoir de l'éducation.
Josline, débordée par l’énergie de ses trois enfants, Blaisline (5 ans), Prégavie (4 ans) et Blaisilia (1 an), vit dans le centre depuis 4 ans. Arrivée en France en 2016, elle rêve de pouvoir travailler quand ses enfants seront plus grands.
Hermine, originaire du Congo, vit dans le centre depuis près de 6 ans avec sa fille Chirmine, 10 ans. Ancienne coiffeuse, elle tresse les cheveux des autres résidentes et espère exercer son métier en France. Très fusionnelles, elles ont entièrement redécoré leur chambre, créant un véritable cocon.
Nkembi, 37 ans, et son fils Gabriel, 14 mois, vivent en France depuis 3 ans et sont au centre depuis deux mois. Parlant couramment français, elle sait que la langue est la clé de l’intégration. Ancienne pâtissière en Angola, elle rêve de reprendre une activité, notamment en partageant sa spécialité : une galette des rois revisitée, avec des fruits confis et des amandes.
Omon, originaire du Nigéria, et sa fille Stéphanie, 16 mois, ont d'abord vécu en Italie avant de s’installer en France. Passionnée de cuisine, Omon rêve de travailler dans la restauration. En attendant, elle partage généreusement ses talents culinaires avec les résidentes et les assistantes sociales du foyer.
Rabha, 32 ans, et sa fille Helya, 3 ans, vivent depuis 10 mois dans un tiny house qu’elle a aménagé seule. En Algérie, elle travaillait dans une mairie. Quand le cafard la prend, elle écoute la chanteuse libanaise Elissa Khoury. Elle espère un futur plus serein pour sa fille et elle-même.
Christelle, une femme de 33 ans, porte les traces d'un passé douloureux marqué par les violences conjugales. Depuis son arrivée au centre le 11 mai 2020, elle a trouvé un semblant de paix. Travaillant comme aide-soignante, elle reconstruit sa vie pièce par pièce, tout en veillant sur ses enfants Bénicia et Benjamin, dont les troubles psychologiques requièrent une attention constante et beaucoup d'amour.
`Yousra, venue d’Algérie en 2019 avec sa fille Sandra, 21 mois, est fière de l’intérieur impeccable de leur tiny house. En plein ramadan, elle prépare un tajine, laissant les épices embaumer l’air. Travaillant à mi-temps dans une société de nettoyage, elle rêve de stabilité.
Inès, 37 ans, et sa fille Guilaine, 1 an, vivent au centre depuis 5 mois. Venue du Cameroun, Inès garde son passé pour elle. Hébergée dans l’anonymat, elle tente de trouver la paix et la sécurité nécessaires pour commencer une nouvelle vie. Depuis, Inès a trouvé un travail dans la restauration collective et vit dans son appartement avec sa fille.
Inès attend avec une patience mêlée d'angoisse la réponse pour un appartement qu'elle espère depuis longtemps. Les cartons, déjà prêts, témoignent de son désir ardent de stabilité pour elle et sa petite fille, avec qui elle réside au centre depuis deux ans. L'attribution finale lui échappe, un coup dur qui teste sa résilience.
Inès, rayonnante, m'accueille dans son nouvel appartement décoré avec amour, où elle vit avec sa fille de trois ans et demi. Elle travaille sous contrat à durée déterminée dans la restauration collective, un emploi dont les horaires matinaux lui compliquent la vie quotidienne, surtout en l'absence de ses deux autres enfants, qui sont au Cameroun. Malgré la distance qui pèse lourdement sur son cœur, la fierté qu'elle éprouve pour ce nouveau départ illumine son visage.


































