Dans un monde où l’écoute et la bienveillance deviennent essentielles, le lien qui unit humains et animaux révèle une force apaisante. L’association Handi’chiens forme depuis longtemps des chiens d’assistance capables d’accompagner des personnes en situation de handicap ou de fragilité, et d’adoucir leur quotidien. À travers ces portraits, Frédéric Bourcier met en lumière cette complicité silencieuse, ce soutien réciproque qui fait d’eux de véritables compagnons de route. Photographiés dans des lieux publics, ces duos partagent une même présence, une même confiance. Ces chiens disposent d’une carte officielle leur donnant accès à ces espaces, même si cet accueil reste parfois encore mal compris par certaines structures.

Dans le tumulte des parcours migratoires, certaines femmes trouvent enfin un lieu où reprendre souffle après des mois d’errance, de peur et de violences. Accueillies par l’association Notre-Dame des Sans-Abri, elles vivent provisoirement dans de petites chambres qu’elles transforment peu à peu en refuges pour elles et leurs enfants. À travers ces portraits, Frédéric Bourcier souhaite révéler cette étape fragile où la sécurité renaît, où les gestes se posent, où l’on réapprend doucement à se reconstruire. Montrer la force discrète de ces « passagères », souvent invisibles, c’est rappeler qu’avant les frontières et les statuts, il y a d’abord des femmes qui cherchent simplement un horizon plus doux.

C’est un monsieur cabossé par la vie, dont je ne connais pas toute l’histoire. Il a perdu ses papiers, refuse l’assistance, mais conserve une dignité farouche. Il ne mendie jamais : il vend biscuits ou calendriers, avec l’élégance d’un ancien commercial qui choisit toujours chemise et chaussures de ville, même si ses pieds en souffrent. Sa mémoire lui joue des tours, ses réponses s’égarent parfois en monologues, mais il partage ce qu’il veut bien livrer. Après des années de visites, il a accepté d’être photographié. Ce monsieur, c’est Bernard G., mon pote à cinq euros. Raconter ses passages, c’est garder une trace de cette solitude silencieuse et de la place qu’il a prise dans ma vie.

J’ai découvert « Valse avec Bashir » en 2010, un film qui retrace la mémoire meurtrie d’un soldat israélien après le massacre de Sabra et Chatila. Cette plongée dans l’Histoire m’a poussé à me rendre à Beyrouth, où le camp ressemble aujourd’hui à un quartier dense, surveillé de près par le Hezbollah. Y entrer est presque impossible : observateurs armés, regards méfiants, contrôle permanent. Refoulés une première fois, nous avons finalement pu passer grâce à la mère de mon contact, engagée dans une petite ONG locale. Un vieil homme nous a guidés, déterminé à témoigner pour retrouver l’endroit où repose son fils. Les femmes, d’abord hésitantes, ont accepté d’être photographiées et ont laissé surgir des récits bouleversants. Dans ces ruelles précaires, entre enfants qui jouent et murs qui s’effondrent, j’ai surtout vu une douleur qui ne s’éteint jamais et un silence qui persiste encore.

Partout dans le monde, des hommes et des femmes accomplissent chaque jour des tâches essentielles dont on ne mesure pas toujours l’importance. Ils récoltent, réparent, transportent, construisent, soignent… autant de gestes qui permettent à une société de tenir debout, mais qui passent souvent dans l’ombre. Avec Workers, Frédéric Bourcier met en lumière celles et ceux qui travaillent loin des projecteurs, fiers de leur métier et de ce qu’il apporte à leur famille. À travers ces portraits, il célèbre la force tranquille du quotidien, la précision d’un geste, la dignité d’une activité qui nourrit et qui relie. Ce sont des visages du monde, des vies engagées dans l’essentiel.

Ce reportage raconte une journée auprès d’Héloïse, assistante sociale à l’hôpital gériatrique Pierre Garraud, et de Saïko, un golden retriever formé par Handi’chiens. Leur duo apporte une douceur nouvelle au quotidien des patients comme du personnel. Pendant la crise du Covid, Héloïse fut l’un des rares liens humains des résidents privés de visites. Convaincue de l’importance du réconfort dans les soins, elle s’est tournée vers Handi’chiens pour enrichir sa pratique. Après deux ans de formation, Saïko l’a rejointe, devenant collègue et compagnon. Ensemble, ils apaisent, stimulent, rassurent. Les résidents s’ouvrent plus facilement, les soignants retrouvent un souffle, et chaque visite devient un moment de bienveillance partagée.

À Guatemala City, près de sept cents fillettes ont fui un foyer devenu trop dangereux pour survivre. Abus sexuels, violence, alcoolisme, misère ou rejet : autant de raisons qui poussent ces mineures à quitter leur famille pour chercher refuge dans la rue, où elles risquent pourtant de s’y perdre, et parfois d’y mourir. Niñas en la calle donne un visage à ces gamines invisibles, livrées à elles-mêmes dans une ville qui les menace autant qu’elle les ignore. À travers ces portraits, Frédéric Bourcier raconte la fragilité de ces vies précaires, leurs peurs, mais aussi leurs rêves simples : manger chaque jour, être en sécurité, et espérer qu’une chance, même infime, puisse un jour changer leur destin.

À Tanger, certains enfants grandissent dans la rue, livrés à eux-mêmes et exposés à tous les dangers. Une association leur offre une échappée possible en les initiant aux arts du cirque : jonglage, acrobatie, équilibre… autant de disciplines qui deviennent pour eux un apprentissage, mais aussi une manière de retrouver confiance. En les préparant à se produire dans l’espace public, l’association leur donne une visibilité nouvelle, loin de l’errance et du silence qui les entourent. Un lieu où ces enfants peuvent rêver, se dépasser et entrevoir, au-delà de la rue, la possibilité d’un futur plus digne.

En 1994, accéder à la prison centrale de Kigali relevait du défi. Prévue pour un peu plus de deux mille détenus, elle en a hébergé jusqu’à onze mille après le génocide. Trois quartiers coexistaient : hommes, mineurs et femmes, souvent avec leurs enfants. À l’intérieur, presque aucun surveillant ; seulement quelques prisonniers chargés de maintenir l’ordre, parfois violemment. La frontière entre les quartiers était si mince qu’elle laissait craindre les pires abus, notamment envers les plus jeunes. Les conditions d’hygiène étaient désastreuses, et le paludisme comme la dengue faisaient des ravages. J’ai pu entrer brièvement, avant d’être refoulé par les détenus. Cette vision reste celle d’un lieu saturé, étouffant, où la survie tenait du hasard.

Au cœur de Minorque, les fêtes de Sant Lluís célèbrent la puissance et l’élégance des chevaux noirs de l’île. Dans une atmosphère vibrante, ils exécutent le célèbre Jaleo, se dressant sur leurs pattes arrière au milieu de la foule, tandis que la fanfare amplifie chaque instant. Les participants tentent de toucher la poitrine des chevaux cabrés, geste symbolique devenu l’un des moments forts de ces festivités. Mon reportage explore cette rencontre entre ferveur populaire et tradition équestre, où processions religieuses, caixers et cérémonies solennelles se mêlent aux scènes plus libres des défilés et aux créations locales. Une immersion dans une culture qui place le cheval au centre de son identité.

Couleurs d’ailleurs est un voyage visuel à travers les continents, une immersion dans les teintes et les lumières qui façonnent nos émotions. Des marchés de Madagascar aux ruelles de New York, des étendues sombres de l’Afghanistan aux tons vifs du Ghana, chaque image explore la palette d’un monde en mouvement. Ici, les couleurs ne sont pas seulement esthétiques : elles racontent des histoires de vie, des instants suspendus, des lieux marqués par le temps et l’humain. Frédéric Bourcier invite le spectateur à ressentir, plutôt qu’à voir : à capter un rouge qui annonce l’aube, un bleu de la mer ou un jaune de poussière. Une manière de toucher le monde au-delà des mots.